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8 janvier 2017 7 08 /01 /janvier /2017 15:12

« Ce sont ces vérités [la fonction de l'homme dans la condition terrestre, id est la réalisation du Divin] que le matérialisme veut ignorer à tout prix, par la logique des choses, il aboutit à l'égalitarisme, donc à ce qui est le plus contraire à la nature humaine. En effet, si nous sommes tous égaux dans la matière, c'est-à-dire dans les besoins matériels et les lois physiques, cela n'a absolument rien à voir avec notre qualité d'hommes ; or, celle-ci est notre raison d'être, ou, en d'autres termes, elle est ce qui seul nous distingue des animaux. Le matérialisme équivaut dont à une réduction de l'homme à l'animal, et même à l'animal le plus inférieur, puisque celui-ci est le plus « collectif » ; cela explique la haine des matérialistes pour ce qui est supra-terrestre, transcendant, spirituel, car c'est précisément par le spirituel que l'homme n'est pas animal. Qui renie le spirituel renie l'humain: la distinction « morale » et « légale » entre l'homme et l'animal devient alors purement arbitraire, à la façon d'une tyrannie quelconque ; c'est dire que l'homme perd, par son abdication, tous les droits sur la vie des animaux qui, eux, ont les mêmes « droits » que l'homme, puisqu'ils ont les mêmes besoins matériels ; on peut évidemment faire valoir le droit du plus fort, mais alors il n'est plus question d'égalité, et ce « droit » vaudra aussi pour les hommes entre eux. Enfin, il est encore une chose dont les matérialistes ne tiennent aucun compte, et c'est le fait que l'homme souffre d'être dans la chair : la honte qu'il éprouve de son existence physiologique est un indice suffisant du fait qu'il est, dans la matière, un étrange et un exilé ; la « transfiguration » éventuelle de la chair par la beauté humaine ne change rien aux lois humiliantes de son existence. » 

                                                                                          F. Schuon, L'Oeil du Coeur 

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6 janvier 2017 5 06 /01 /janvier /2017 13:35

Anomalie, erreur, machine méphitique,

Créée par le vice et par l'usurpation,

Mensonge, perfidie, abomination,

Propagande et forfaits : voilà la République.

 

« Mais ce beau pays, il ne suffit pas de le garder et de l'agrandir, il faut le mettre en valeur. Le Roi construit des routes, traces des canaux, creuse des ports, endigue les rivières, ouvre des écoles, crée des hôpitaux, protège des Universités et des Académies. Monuments de gloire et d'utilité le proclament à l'envi père de la patrie et bienfaiteur public.

 

Quand les vieux auteurs parlent de lui, ils paraissent saisis d'une dévotion surnaturelle. Il est, disent-ils, le premier des Rois. Aucun souverain ne peut lui être comparé, ni pour l'ancienneté de sa couronne, ni pour l'éclat de son trône, ni pour l'étendue et la sainteté de son pouvoir. C'est un personnage divin que toute la nation honore et sert avec joie : « tout l’État est en lui, écrit Bossuet, la volonté du peuple est enfermée dans la sienne ; comme en Dieu est réunie toute perfection et toute vertu, ainsi toute la puissance des particuliers est réunie dans celle du Prince... » On disait couramment en Europe que le Français était « ivre d'amour pour son Roi. » Le maréchal Marmont, né quinze ans avant la Révolution, raconte, dans un passage célèbre de ses Mémoires, quel prestige avait encore Louis XVI dans les derniers jours de la monarchie : « J'avais pour le Roi un sentiment difficile à définir, un sentiment de dévouement avec un caractère religieux. Le mot de Roi avait alors une magie, une puissance que rien n'avait altérées. Dans les cœurs droits et purs, cet amour devenait une espèce de cultes. » Et l'on citait avec complaisance cette phrase d'un ambassadeur vénitien du XVIe siècle ; « Le royaume de France a toujours été reconnu, par un consentement unanime des peuples, pour le premier et le plus excellent royaume de la chrétienté, tant par sa dignité et sa puissance que par l'autorité absolue de celui qui le gouverne. »

 

Mais ce sont là des mots, des mots dont le sens a souvent changé, car les hommes ne se font pas de l'autorité une idée unique et invariable, mais, au contraire, l'entendent de façons changeantes et diverses.

 

La manière dont la France monarchique s'étaient formée par pièces et morceaux sur les ruines de la France féodale donnait au pouvoir royal, théoriquement sans limites, un caractère et des bordes que, citoyens d'un État bureaucratique, napoléonien et à demi socialisé, nous soupçonnons difficilement.

 

L'autorité nous apparaît aujourd’hui sous les traits d'un fonctionnaire assis derrière un bureau et investi des droits les plus étendus, y compris celui de nous transformer en militaires et de nous envoyer recevoir des morceaux d'acier sur les champs de bataille.

 

Ce personnage est éternel, immuable, identique à lui-même d'un bout à l'autre du territoire. En plaine et en montagne, en Île-de-France et en Lorraine, il applique les mêmes règlements et perçoit les mêmes impôts. Il est tout-puissant parce que son espèce est nombreuse, parce que tout le monde a besoin de lui, parce que ses décrets sont appuyés sur une police active, une magistrature vigilante et un immense matériel de coercition. Il recense, enregistre, espionne. Il dénombre nos revenus et fait l'inventaire de nos héritages. Il sait si nous possédons un poste radio, un chien ou une automobile. Il instruit nos enfants et fixe le prix de notre pain. Il fabrique nos allumettes et nous vend notre tabac. Il est industriel, armateur, commerçant, assureur et médecin. Il a des tableaux, des forêts, des chemins de fer, des hôpitaux, des banques et des usines. Il accapare la charité. Si nous appartenons au sexe masculin, il nous fait comparaître devant lui, nous pèse, nous mesure, examine le fonctionnement de notre cœur, de nos poumons et de notre rate. Nous ne pouvons faire un pas ou un geste sans qu'il en soit averti, sans qu'il trouve prétexte d'intervenir. Sans parler des industries nationalisées, un million de Français au moins sont à son service, deux ou trois millions sont pensionnés par lui et les autres aspirent à l'être. Tout le monde grogne, mais obéit, et lorsqu'un de ses agent est houspillé par un électeur mécontent, il n'y a qu'une voix pour flétrir cette audace, demander des prisons et des juges pour le sacrilège.

 

Cette conception d'un gouvernement bureaucratique servi par une armée de fonctionnaires, promulguant pour une nation d'administrés une seule législation, est peut-être ce qu'il y a de plus étranger à l'Ancien Régime. Les plus grands réformateurs, les plus amoureux de l'unité, Colbert, Machault, Maupeou, Lamoignon, ne pouvaient même pas imaginer une pareille uniformité, ni pareille docilité. »

P. Gazotte, La Révolution française

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5 janvier 2017 4 05 /01 /janvier /2017 12:54

"Le sens et la raison suffisante de l’homme est de connaître, et connaître, c’est inéluctablement connaître la Divinité. Connaissant la Divinité, l’homme L’affirme, La proclame, L’enseigne par la force des choses, puisque l’action manifeste Dieu par définition, et que la créature ne saurait donc rien faire qui n’affirme pas Dieu d’une façon quelconque; de même, l’être agit dès qu’il vit, et son action est la manifestation de sa vie. L’existence de l’homme, comme l’existence de tout être, n’a aucun sens, si ce n’est celui d’affirmation de la Divinité. La Divinité affirme l’homme en lui donnant l’existence, et l’homme affirme — et doit affirmer — la Divinité parce qu’il existe. Ne pas affirmer la Divinité ou affirmer autre chose que la Divinité n’aurait de sens que si nous n’existions pas; or cette supposition est absurde, car nous existons.

 

L’homme ne peut donc s’empêcher d’affirmer la Divinité d’une manière ou d’une autre, puisqu’il existe. S’il nie ou plutôt croit nier la Divinité, l’existence même de celui qui nie affirme Ce qu’il nie. L’homme peut dire non, mais son existence dit oui. Qui nie la Divinité nie son existence, et elle lui sera enlevée — parce qu’il se l’enlève à lui-même — sans que pourtant elle puisse lui être enlevée effectivement, c’est-à-dire autrement que d’une manière symbolique. S’il arrive que des êtres nient inconsciemment leur existence en niant consciemment la Divinité, sans pouvoir s’enlever cette existence, ne se l’étant pas donnée, c’est encore parce que la Divinité est infinie, et que Son affirmation doit retracer également, selon son mode propre, cette Infinité : en effet, la Divinité, étant infinie, comporte toutes les possibilités inhérentes à l’Infinité; or le néant est une possibilité, au degré que la Toute-Possibilité lui assigne, et Celle-ci ne peut, par définition, exclure aucune possibilité. Si l’Infinité ne comportait pas le néant dans la mesure de la possibilité de celui-ci, Elle serait limitée par l’absence de ce néant, et ne serait donc pas Infinité. Or le néant, tout en étant l’impossibilité, peut être dit possible dans un certain sens, sans quoi il ne serait aucunement concevable, ni à plus forte raison exprimable; il n’est certes pas possible en lui-même, car en lui-même il n’a aucune réalité ni existence; mais il est possible dans l’Infinité, et en raison de Celle-ci; en d’autres termes, si l’Infinité laissait en dehors d’Elle Sa propre négation ou plutôt l’apparence de Sa propre négation, Elle ne serait pas Infinité. L’imperfection n’est rien d’autre qu’un aspect nécessaire de l’Infinité manifestée; l’imperfection existe, parce que l’Infini est infini, et que, par conséquent, l’inexistence de l’imperfection limiterait l’Infinité qui est, par rapport à cette imperfection, la Perfection. L’Imperfection n’existe en aucune manière en dehors de l’Infinité, n’ayant en elle-même, comme nous l’avons dit, ni réalité ni existence. Le Verbe, qui est l’affirmation de l’Infini, doit affirmer tous les aspects ou toutes les possibilités de celui-ci. Le Verbe doit donc affirmer le mal, non pas comme tel, mais comme ombre nécessaire dans l’affirmation cosmique de l’Infini (1).

(1) « De même que le soleil, œil du monde, n'est pas souillé par les impuretés extérieures que perçoivent nos yeux mortels, de même l’Être unique qui est en toute chose n'est pas souillé par le mal qui règne dans le monde, car Il en est distinct » (...)."

                                                                                           F. Schuon, L'Oeil du Coeur

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29 décembre 2016 4 29 /12 /décembre /2016 21:36

J'appris l'autre jour que les démons en alarme

Allèrent tous trouver leur exécrable roi,

Qui règle leurs méfaits et leur dicte leur loi,

Pour lui dire ceci avec force vacarme :

 

« Ô maître vénéré, dont la dextérité,

L'indicible talent, la sinistre sagesse,

Sont féconds en noirceur et en scélératesse,

Sauve-nous, sans délai, de notre oisiveté !

 

Nous avions, jusque-là, un règne sans partage

Et pouvions, sans repos ! corrompre les mortels,

Les conduire à notre aise à tes maudits autels ;

Mais voilà qu'à présent... nous sommes au chômage !

 

Une race effroyable, et ce même à nos yeux !

Plus rusée que nous et plus pernicieuse,

A pris notre rôle en notre œuvre ténébreuse

Et corrompt aisément ce qu'il y a sous les cieux.

 

Nous sommes dépassés par ces gens diaboliques,

Quoi que nous tentions, ils devancent nos vœux,

Et font bien mieux que nous notre travail affreux...

Aide-nous ! - Qui sont-ils ? - Ce sont les politiques...»

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20 novembre 2016 7 20 /11 /novembre /2016 17:03

Tout près du lac Djerid, là où l'eau et la terre engendrent le sel, un homme très prétentieux qui pérorait partout, sur les places, dans les rues, entamait toujours son discours en disant « Moi, je ». Voyait-il un maçon occupé à monter son mur ; il disait :

─ Moi, j'aurais fait comme ceci.

Voyait-il un tisserand monter sa chaîne sur le métier, il disait :

─ Moi, j'aurais fait comme cela.

Et encore et toujours des « Moi, je ». L'imam lui-même, qui était un homme bon et attentif à la parole d'autrui, ne pouvait plus le supporter.

Un jour, il glissa des deux pieds sur des figues pourries qui traînaient dans la ruelle. Il avait très mal au cul et demeurait là à même le sol en criant :

─ Moi, je n'aurais jamais planté le figuier à cet endroit !

Un enfant s'approcha de lui pour lui dire :

─ A ta place, moi je me relèverais.

 

Celui que tu vois répondre à toute question, exprimer tout ce qu'il contemple, mentionner tout ce qu'il sait, tu peux conclure à son ignorance.

Hikam*

                                                                                         Contes des sages du désert

* Parole de sagesse.

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20 novembre 2016 7 20 /11 /novembre /2016 17:00

Il était, près du Djebel Chambi, un enfant qui avait à peine dix ans et qu'on avait surnommé « Dhouibi », ce qui veut dire « Petit loup », parce que malgré son jeune âge il courait et furetait dans tout l'alentour du village. On le voyait, tantôt près de l'oued, occupé à traquer quelque bête, tantôt dans les ruines de l'ancien village, à la recherche d'on ne sait quoi. De toutes ces fugues et vagabondages, il rapportait de petits trésors : une queue de serpent, une ancienne pièce de monnaie, un os de chameau, une pierre trouée et encore bien d'autres choses.

Mais ce qu'il aimait surtout, c'était de grimper au plus haut des ruines pour y regarder l'horizon. Il se disait que là où le ciel et la terre se rejoignent, il devait bien y avoir quelque chose à trouver. « Je voudrais voir l'horizon, pensait-il. Je voudrais le toucher. »

Un matin, à l'insu de ses parents, il fit son bagage et se mit en route non sans avoir demandé à son grand-père ce qu'il y avait à l'horizon ; lequel lui répondit :

─ Je ne sais trop. Tout ce que je sais, c'est que là-bas (et il désignait du doigt la croupe de la montagne) il y a un autre village qui était une étape pour les pèlerins. Il n'est pas trop loin. Que Dieu t'accompagne et reviens-nous vite : tu nous es cher.

Et Dhouibi se mit en route, sa besace à l'épaule. Après quelques heures de marche, il atteignit l'autre village qui lui parut beaucoup plus beau que le sien : les maisons semblaient mieux bâties, les gens plus accueillants et la voix du muezzin beaucoup plus douce. Ce dernier le fit monter au plus haut du minaret pour qu'il puisse bien voir le paysage.

─ Qu'y a-t-il là-bas ? demanda-t-il en pointant du doigt l'horizon ?

─ Là-bas, il n'y a plus rien, sauf un bordj inhabité depuis longtemps. Il est à deux heures de route. Je vais te donner de l'eau, du lait et des dattes. Que Dieu t'aide.

Dhouibi atteignit le bordj. Contrairement à ce que lui avait dit le muezzin, il y rencontra quelqu'un : un vieil homme qui vivait de presque rien et passait son temps en méditation et prière. Il le reçut dignement et lui proposa le gîte. Dhouibi le remercia et s'endormit.

Le lendemain, voyant l'aube s'allumer, il demanda à l'homme :

─ C'est encore loin l'horizon ?

L'autre sourit et dit :

─ Je le cherche depuis longtemps et ne l'ai pas encore atteint. Mais je commence à le connaître.

─ Et comment donc ?

─ En demeurant ici. L'horizon n'est pas là-bas. Il est dans notre tête comme il est dans la tienne, qui me semble bien formée. Nous courons tous après l'horizon et nous peinons à le trouver.

Parce qu'il est limite. Tu comprendras cela plus tard et peu à peu. Tu es déjà en progrès, Dhouibi, puisque tu as eu le courage de marcher jusqu'ici. Et maintenant retourne dans ton village : tu y verras plus d'horizons que tu ne connaissais pas.


Contes des sages du désert

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13 novembre 2016 7 13 /11 /novembre /2016 13:49

- Quel est l'intérêt, pour moi, de savoir ce que X pense de Y ?
- Aucun. 
- En es-tu certain ?
- Oui, je ne vois pas en quoi cela pourrait t'être profitable de savoir ce que telle personne pense de telle autre. 
- Je suis bien d'accord avec toi. Je suis d'avis que si une personne nous intéresse pour telle ou telle raison, notre devoir consiste à nous en faire nous-mêmes notre propre opinion en confrontant ses intentions et ses actions aux principes qui sont nôtres. 
- Je n'aurais su le mieux dire. Mais où veux-tu en venir en énonçant cette éclatante évidence ?
- Éclatante évidence ? Elle doit être si éclatante alors qu'elle aveugle bien des gens... 
Voici où je veux en venir : Nous sommes convenus que nous n'avons nul intérêt à savoir ce qu'une personne pense d'une autre et que nous devons nous-mêmes forger notre opinion le cas échéant sur les gens. La question qui se pose est la suivante : Ce qui est vrai dans le cadre général le serait-il aussi en matière politique ? En d'autres termes, nous est-il profitable de savoir ce que les gens pensent de l'engeance politique ?
- A mon humble avis, non point. Les politiques, après tout, sont des hommes comme les autres, à cette différence près que leur turpitude et leur corruption dépassent le seuil moyen. Cela dit, je ne comprends toujours pas ce que tu as tête...
- Ceci : pourquoi fait-on des sondages ? Par les sondages, on dit bien ce que les gens pensent de telle ordure - figure, voulais-je dire - politique, pourquoi ? Je n'en vois pas l'intérêt...
- Ah... Tu aurais pu être plus explicite dès le début...
- Je l'ai été, en partant de la généralité pour arriver à la particularité. Je t'écoute donc. 
- Les sondages n'ont pas pour rôle de dire au public ce que "les gens" pensent des politiques. En vérité, ils n'ont que deux fonctions : d'une part ils cherchent à manipuler les esprits faibles qui, incapables eux-mêmes de se faire une opinion, s'appuient sur ces enquêtes, du reste fallacieuses souvent, pour soutenir telle ou telle "ordure" comme tu dis et, d'autre part, ils permettent de favoriser l'une aux dépens des autres. En effet, supposons cette situation simple : Jean et Marc sont en lice. Jean est le "candidat du système" comme l'on dit et Marc celui du peuple. On fait un sondage qui révèle que Marc jouit d'une popularité plus forte que celle de Jean. Que fait-on alors ?
- On fausse les sondages suivants ?
- Oui, c'est une possibilité, mais on renforce surtout la propagande médiatique en faveur de Jean si bien qu'en fin de compte, sauf accident, Jean sort vainqueur... Les sondages - qui n'ont strictement aucune espèce valeur dans l'absolu, mais c'est une autre question - se résument en deux mots en matière politique : manipulation et promotion. 
- Je vois... Pauvre peuple... 
- Ne le plains pas... Le Ciel ne l'a pas condamné à la débilité perpétuelle... Il n'a qu'à se réveiller !

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12 novembre 2016 6 12 /11 /novembre /2016 17:31

Mon cher ami,
 

J'ai bien reçu ta lettre et si j'ai tardé à te répondre, je te prie de ne pas prendre ce retard comme l'effet d'une quelconque négligence car il n'est dû qu'aux multiples obligations que nous imposent les circonstances. Cela dit, je suis heureux d'apprendre que tu as pu enfin donner une certaine stabilité à ta vie et que ta situation est, globalement, tout à fait satisfaisante.
 

Cependant, en dépit de ce confort intellectuel et physique, tu te plains longuement de la solitude qui t'entoure et oses, mon insolent ami ! me demander conseil pour résoudre cet apparent problème que tu considères comme la principale cause du muet chagrin qui te tourmente. Que te dirais-je, mon cher ? Tu me connais depuis longtemps et sais bien que je ne suis ni bon conseiller, ni philosophe, et encore moins un sage. Par conséquent, pour éviter les vains bavardages ou conseils peu judicieux, je devrais me taire à l'instant et te renvoyer à l'étude et à la réflexion pour te permettre d'y trouver remède à ton mal. Mais, hélas ! mes justes scrupules ne résistent guère aux droits de l'amitié... Je vais donc formuler quelques brèves remarques, non pas pour te sortir de la solitude, mais pour donner quelque aliment à ta pensée. Tu en feras ce que tu voudras, ce ne sont que les mots d'un ami.
 

Tu sais bien mon attachement au sens des mots (« eh voilà ! te dis-tu sans doute, encore ses histoires d'étymologie... »), ma première remarque va donc porter, tout naturellement, sur le mot «solitude ». Comme tu le sais, ce mot est issu du latin solitudo, lui-même dérivé de l'adjectif solus. Or ce dernier mot, avant de signifier « délaissé », « seul », veut dire « unique »... Vois-tu ce je veux dire ? Ceci : « solitude » ne veut pas dire autre chose qu' « unicité » et tout homme, étant unique, est nécessairement marqué par une solitude ontologique. C'est cette solitude, ou cette unicité principielle qui constitue la première impossibilité à toute communion totale, à toute communauté intégrale, à toute sympathie cordiale si bien que, même dans les relations amicales ou matrimoniales les plus intenses, il demeure toujours une certaine divergence heureuse entre les individus. La solitude, donc, n'est autre chose qu'un attribut nécessaire de toute créature qui est, par ailleurs, un clin d’œil – si j'ose dire – à la solitude du Créateur, ou à l'unicité divine. Pourquoi donc se plaindre d'une nécessité absolue laquelle, par ailleurs, constitue un trait d'union entre l'homme et Dieu ? Oserais-tu donc te lamenter de ce que tu as un point commun avec ton Créateur ? Si tu avais cette sotte audace, mon cher ami, tu mériterais que je vinsse à l'instant te tirer les oreilles !
 

« Mais, mon cher, je ne parle pas de ces choses-là voyons...tu me parles de la métaphysique pour m'embrouiller l'esprit... » t'entends-je dire. Je suis bien conscient que tu ne songeais point à cette solitude-ci, mais il faut bien rappeler – du moins est-ce une mienne tare – le sens des mots et les principes pour descendre ensuite dans les situations concrètes. Ton souci, je l'ai bien entendu, c'est l'isolement social et non cette solitude dont je me suis permis de te rappeler le sens. Tu manques de relations, de « contacts » comme l'on dit, d'amis. Est-ce un problème ? te demanderais-je. J'en attends, dans ta lettre prochaine, la réponse. Mais voici ce que je puis en dire.
 

J'entends presque, dans le mot « ami », « âme-mi » ou « moitié de l'âme » et le mot lui-même est étymologiquement lié au mot « amour ». Je fais cette brève remarque pour te rappeler que l'amitié et l'amour sont des sentiments extrêmement proches, à tel point qu'un philosophe disait que l'un est la folie de l'autre. Il avait tort, assurément, mais la frontière entre les deux sentiments est en effet très ténue. Cette proximité essentielle fait que l'un est presque aussi rare que l'autre en vérité et qu'il est, par ailleurs, aussi vain, pour ne pas dire stupide, de chercher l'un que l'autre. L'amour, s'il doit venir, vient de lui-même. Il en va de même pour ce qui est de l'amitié véritable. Cesse donc, mon cher, de chercher des amis et, si j'ose te donner encore un conseil, tâche d'avoir des vertus pour amies plutôt que des hommes. « Mon ami délire ! » penses-tu en riant... Non point. En voulant des amis, étant entendu que les véritables amis sont d'une rareté adamantine, tu connaîtras bien des déceptions et, à coup sûr, seras-tu dégoûté de l'amitié elle-même à force de rencontrer des sots, des hypocrites, des dérangés mentaux, des profiteurs et j'en passe. En revanche, si tu cherches à avoir des vertus pour amies, que tu incarneras toi-même au préalable, tu deviendras sans effort l'ami de ceux qui les incarnent et la providence se chargera, je t'en assure, de vous mettre en lien... N'est-ce pas « par hasard », comme l'on dit, que nous nous rencontrâmes voici des années ? Qui eût pensé que d'un simple échange de politesse et d'une vaine question politique une telle amitié pourrait naître ?
 

Quant à l'isolement, il y aurait bien des choses à dire. Mais je t'avoue que l'énergie me manque à présent. J'aurais peut-être l'occasion d'y revenir un jour, pour l'instant, garde à l'esprit ceci : l'isolement total n'existe pas. En tant qu'individus, ou en tant que créatures, nous sommes placés de fait dans un incommensurable réseau d'interactions à la fois physiques, psychiques et spirituelles ou intellectuelles. Ce qui veut dire que nous sommes, consciemment ou non, en relation permanente avec les deux mondes et tout ce qui les peuple... Je ne vais pas développer cela, tu risquerais encore de me reprocher de faire de la métaphysique. L'isolement, à cet égard ne peut être qu'apparent et volontaire. Je veux dire par là qu'on ne peut « s'isoler » qu'en s'enfermant soi-même dans un obscur cachot, et même dans ce cachot, l'isolement ne serait que physique...
 

L'autre chose que tu devrais garder à l'esprit est que tu as une famille... Quelle que soit la nature des relations que puisses avoir avec elle, n'oublie jamais qu'elle constitue le premier réseau autour de toi et qu'en cas de danger ou de problèmes, c'est ton premier bouclier et ta première ressource. Est-ce peut-être pour cela qu'une certaine diabolique engeance fait tout pour détruire la famille...
 

N'oublie pas, enfin, que malgré ton « isolement » ou ta « solitude », tu peux compter toujours sur l'amitié indéfectible de quelques-uns qui sont prêts, et je te parle sans exagération, à se sacrifier pour toi le cas échéant, qui ne reculeraient devant nul obstacle pour te venir en aide... Je suis de ce petit nombre que tu as honoré de ton amitié.
 

Que Dieu te protège, mon ami !

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5 octobre 2016 3 05 /10 /octobre /2016 15:57

Il est intéressant de remarquer que le mot latin victus, lequel est radicalement attaché à vita (« vie » - les mots « viande », « nourriture, ce qui maintient en vie », « vital », « victuailles » etc. en sont les descendants plus ou moins lointains) signifie à la fois « nourriture », « régime alimentaire » et « façon de vivre », « genre de vie », « habitude ».

 

Cette polysémie est notable en ceci qu'elle indique, de manière explicite, le lien évident qu'il y a entre la viande (id est nourriture) que nous consommons et la manière dont nous vivons. En d'autres termes, elle témoigne – au-delà de la simple dimension physique – de l'impact inéluctable du régime alimentaire sur la mentalité humaine et permet de comprendre les interdictions alimentaires que l'on trouve, mutatis mutandis, dans toutes les traditions authentiques.

 

Une simple observation, à titre d'exemple, permettrait de constater que les peuples qui consomment avec excès de la chair sont intellectuellement nettement plus engourdis, plus épais, plus inconscients que ceux qui en consomment avec modération, (il serait aisé d'en citer des cas concrets, mais je m'en retiens par crainte de heurter telle ou telle personne). Cela étant, on peut dire à juste raison que l'intellection dépend, en partie, de la manducation. C'est aussi, bien évidemment, cette relation entre les habitudes gastronomiques et la santé psychique qui explique l'abattage dit rituel... On peut y méditer... . Es quod es... (Tu es ce que tu manges...)

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5 octobre 2016 3 05 /10 /octobre /2016 14:24

Ce sont les sophistes, Protagoras en tête, qui sont les véritables précurseurs de la pensée moderne ; ce sont eux les « penseurs » proprement dits, en ce sens qu'ils se bornaient à ratiociner et ne se souciaient guère de « percevoir » et de rendre compte de ce qui « est ». Et c'est à tort qu'on a vu en Socrate, Platon et Aristote les pères du rationalisme, voire de la pensée moderne en général ; sans doute, ils raisonnent — Shankara et Râmânuja en font autant — mais ils n'ont jamais dit que le raisonnement est l'alpha et l'oméga de l'intelligence et de la vérité, ni a fortiori que nos expériences ou nos goûts déterminent la pensée et priment l'intuition intellectuelle et la logique, quod absit.

 

Somme toute, la philosophie moderne est la codification d'une infirmité acquise ; l'atrophie intellectuelle de l'homme marqué par la « chute » avait pour conséquence une hypertrophie de l'intelligence pratique, d'où en fin de compte l'explosion des sciences physiques et l'apparition de pseudo-sciences telles que la psychologie et la sociologie (1).

 

Quoi qu'il en soit, il faut reconnaître que le rationalisme bénéficie de circonstances atténuantes en face de la religion, dans la mesure où il se fait le porte-parole des besoins de causalité légitimes que suscitent certains dogmes, du moins quand on les prend à la lettre comme l'exige la théologie (2). D'une manière tout à fait générale, il va de soi qu'un rationaliste peut avoir raison sur le plan des observations et des expériences ; l'homme n'est pas un système clos, bien qu'il puisse s'efforcer de l'être. Mais même en dehors de toute question de rationalisme et de dogmatisme, on ne peut en vouloir à personne d'être scandalisé par les sottises et les crimes perpétrés au nom de la religion, ou même simplement par les antinomies entre les différents credos ; toutefois, comme les horreurs ne sont certes pas l'apanage de la religion — les prédicateurs de la « déesse raison » en fournissent la preuve —, il faut nous arrêter à la constatation que les excès et les abus sont dans la nature humaine. S'il est absurde et choquant que des crimes se réclament du Saint-Esprit, il n'est pas moins illogique et scandaleux qu'ils aient lieu à l'ombre d'un idéal de rationalité et de justice. [...]

 

En parlant, plus haut, d'apparentes « absurdités », nous avions en vue surtout l'idée d'un Dieu à la fois infiniment puissant et infiniment bon qui crée un monde rempli d'imperfections et de calamités, y compris un Enfer éternel ; seule la métaphysique peut résoudre ces énigmes que la foi impose au croyant, et qu'il accepte parce qu'il accepte Dieu ; non par naïveté, mais grâce à un certain instinct de l'essentiel et du surnaturel. C'est précisément la perte de cet instinct qui a permis au rationalisme d'éclore et de se répandre ; la piété s'affaiblissant, l'impiété pouvait s'affirmer. Et si d'une part le monde de la foi comporte incontestablement de la naïveté, d'autre part le monde de la raison manque totalement d'intuition intellectuelle et spirituelle, ce qui est autrement grave ; c'est la perte du sacré et la mort de l'esprit. Au lieu de discuter vainement sur ce que Dieu « veut » ou ne « veut pas », les théologiens répondent volontiers, et avec raison, par une fin de non-recevoir : qui es-tu, homme, pour vouloir sonder les motivations de ton Créateur ? Dieu est incompréhensible, et incompréhensibles sont ses volontés ; ce qui, au point de vue de la mâyâ terrestre, est la stricte vérité, et la seule vérité que l'humanité à laquelle le Message religieux s'adresse, soit capable d'assimiler avec fruit. Assimilation plus morale qu'intellectuelle ; on ne prêche pas le platonisme aux pécheurs en danger de perdition, pour lesquels la réalité, c'est le monde « tel qu'il est ».

On peut le voir par ce que nous venons de dire : notre intention n'est pas d'insinuer que la religion devrait être autre chose que ce qu'elle est. Les religions n'avaient pas le choix : la scission, chez l'homme moyen de l'« âge de fer », entre l'Intellect et une intelligence extravertie et superficielle, les obligeait à traiter les adultes comme des enfants, sous peine d'inefficacité psychologique, morale et sociale. Les idéologies profanes au contraire traitent comme adultes des hommes rendus quasi irresponsables par leurs passions et leurs illusions, ce qui revient à dire qu'ils les incitent à jouer avec le feu ; on n'en voit que trop bien les résultats sinistres à notre époque. Dans l'exotérisme religieux, l'efficacité tient parfois lieu de vérité, et avec raison, étant donné la nature des hommes auxquels il s'adresse ; en d'autres termes : pour le théologien volontariste et moraliste, est vrai ce qui aura le bon résultat ; pour le métaphysicien-né, au contraire, est efficace ce qui est vrai ; « il n'y a pas de droit supérieur à celui de la vérité ». Mais tout le monde n'est pas un « pneumatique », et il faut équilibrer les sociétés et sauver les âmes comme on peut.

1Au XIXe siècle, le désir de réconcilier la foi et la raison, ou l'esprit religieux et la science, apparut sous la forme de l'occultisme : phénomène hybride qui malgré ses fantasmagories avait quelques mérites, ne serait-ce que par son opposition au matérialisme et à la superficialité confessionnelle.

2Il y avait des « voix de sagesse » — non sceptiques mais positives et constructives — du côté des croyants eux-mêmes, dans le cadre de la scolastique et celui de la Renaissance ; aussi dans celui de la Réforme, chez d'anciens théosophes par exemple

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